Le texte que je vous invite à lire, fait partie des plus connus de la Bible. Il s’agit de Mt 5.3 : Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux ! Savez-vous qu’au fil du temps, cette parole de Jésus est devenue un dicton populaire ? Elle était parfois transformée et disait à peu près ceci : « Heureux les simples d’esprit, car ils auront droit au royaume des cieux ». Ce qui signifiait que ceux qui souffrent d’une maladie mentale et qui n’ont pas toute leur tête, iront de toute façon au ciel, en raison de leur incapacité à faire la différence entre le bien et le mal. En d’autres mots, si quelqu’un est irresponsable pour raison médicale, Dieu ne l’enverra pas en enfer, mais le fera directement entrer dans le ciel. Par contre, pour les saints d’esprit, ils demeurent responsables de leur éternité...
Mais est-ce le vrai sens de cette déclaration du Christ ?
Bien sûr que non ! Ce n’est pas du tout ce que Jésus a voulu dire. Je vous propose d’en comprendre la signification, et de découvrir en même temps pourquoi elle est capitale pour nous.
Tout d’abord, il s’agit d’une « Béatitude », c’est-à-dire d’une récompense que Jésus promet à ceux qui remplissent certaines conditions dans leur façon de vivre. Dans le « Sermon sur la montagne » elles sont au nombre de huit (du v.3 au v.10). Celle que nous considérons est la première, c’est-à-dire qu’elle marque le début d’une vie de bénédictions pour celui qui obéit, mais c’est une bénédiction qui ne correspond pas à la mentalité de notre société.
Certains auteurs disent que dans les « Béatitudes », Jésus nous livre le secret du bonheur. D’autres disent qu’il s’agit de l’enseignement le plus profond sur l’art d’être heureux. Une chose est sûre : nous devrions nous appliquer à en comprendre le sens ! Intéressons-nous donc à cette béatitude, en commençant tout d’abord par la seconde partie : la récompense. Puis, nous verrons la première partie : la condition.
Tout d’abord, que signifie l’expression « le royaume des cieux » ? Le mot royaume désigne la sphère d’autorité et de gouvernement d’un roi. Autrefois, le royaume de France désignait l’espace géographique qui était sous l’autorité du roi de France.
Le mot cieux désigne l’origine ou la source de ce royaume. Cela signifie que la sphère de gouvernement dont Jésus parle, émane du ciel, là où demeure Dieu. Il s’agit d’un royaume de nature divine. On peut aussi l’appeler le royaume de Dieu.
Etant donné que ce royaume est celui de Dieu, il n’a pas de limites géographiques, comme les royaumes terrestres. Il est partout sur la surface de la terre. Aucun roi ou chef d’état humain n’a d’autorité sur lui, il appartient à Dieu seul. Il transcende toutes les races, toutes les cultures et toutes les époques. N’importe qui peut en faire partie, s’il accepte que le roi de ce royaume règne sur lui ! De qui s’agit-il ? il s’agit de Jésus, qui l’a déclaré lui-même dans Jn 18.36-37 :
36 Mon royaume n’est pas de ce monde, répondit Jésus. Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour moi afin que je ne fusse pas livré aux Juifs ; mais maintenant mon royaume n’est point d’ici-bas.
37 Pilate lui dit : Tu es donc roi ? Jésus répondit : Tu le dis, je suis roi. Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix.
Pour être plus précis : le royaume des cieux (ou de Dieu) se trouve partout ou la royauté de Jésus est reconnu et accepté, mais ce royaume demeure invisible à l’œil humain selon Lu 17.20-21 :
20 Les pharisiens demandèrent à Jésus quand viendrait le royaume de Dieu. Il leur répondit : Le royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards.
21 On ne dira point : Il est ici, où : Il est là. Car voici, le royaume de Dieu est au milieu de vous.
Le royaume de Dieu n’apparaît pas comme les royaumes terrestres : en grande pompe, avec des rituels particuliers ou des couleurs précises. Non ! Il ne frappe pas les regards, car il n’est ni physique, ni naturel. Cependant, s’il n’est pas visible, pourquoi Jésus dit-il que « le royaume de dieu est au milieu de vous » ? C’est parce que là où lui, Jésus, se trouve, là aussi se trouve le royaume de Dieu.
Cela signifie que le royaume de Dieu est en réalité une personne : Jésus-Christ ! Si Jésus est là, le royaume de Dieu est là. Si Jésus est absent, le royaume de Dieu est aussi absent. Le royaume de Dieu n’est pas une sphère géographique, physique et politique dans laquelle nous pouvons entrer sur la base de notre adhésion au christianisme. Non ! Le royaume de Dieu devient réel lorsque nous sommes unis à Jésus. C’est Jésus la sphère dans laquelle nous devons entrer et vivre pour être des citoyens du royaume de Dieu. Donc, pas de royaume de Dieu sans son roi. Mais quelles sont les marques distinctives de Jésus en tant que roi d’un royaume invisible ?
Son trône sur terre, fût la croix de Golgotha. Sa couronne fut la couronne d’épines que les soldats romains mirent sur sa tête avant de le crucifier. Son manteau de pourpre (= couleur de la royauté) fut son sang versé par son sacrifice. Mais Dieu l’a ressuscité et l’a fait assoir à sa droite dans les cieux. Il est appelé maintenant « Le roi des rois », parce qu’il a accepté de donner sa vie pour ses sujets. Et s’il leur demande de lui donner leur vie, c’est parce qu’il a tout d’abord donné la sienne pour les sauver.
Lorsque nous sommes unis à Jésus dans son royaume, plusieurs bénéfices nous sont accordés. Voyons-en quelques-uns brièvement :
1) Nous sommes libérés du royaume de ténèbres de Satan et transférés dans le royaume de lumière du Seigneur selon Col 1.12-14 :
12 Rendez grâces au Père, qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière,
13 qui nous a délivrés de la puissance des ténèbres et nous a transportés dans le royaume du Fils de son amour,
14 en qui nous avons la rédemption, la rémission des péchés.
2) Nous devenons les héritiers de richesses spirituelles que seul le Saint-Esprit peut nous apporter.
Ro 14.17 : Car le royaume de Dieu, ce n’est pas le manger et le boire, mais la justice, la paix et la joie, par le Saint-Esprit.
3) Nous avons accès à des ressources illimitées qui peuvent transformer les circonstances sur terre.
1 Co 4.20 : Car le royaume de Dieu ne consiste pas en paroles, mais en puissance.
Voilà la récompense de ceux qui sont unis au roi Jésus, et qui ont part à son royaume. Cependant, cette récompense est soumise à une clause bien précise :
2. La Condition : Heureux les pauvres en esprit.
En tant que croyants, nous sommes plutôt informés sur la récompense, c’est-à-dire sur les privilèges inhérents au royaume de Dieu. Nous comprenons que ce royaume est une source de provisions extraordinaires, et que nous y sommes entrés par la nouvelle naissance. Toutefois, notre problème c’est l’accès à ces provisions ! Elles nous appartiennent potentiellement, en tant que citoyens, mais nous ne savons pas comment y accéder. Nous oublions ce que Jésus a dit : « heureux les pauvres en esprit, CAR le royaume de cieux est à eux ». Et notre difficulté, c’est que nous ne savons pas ce que signifie l’expression « pauvres en esprit ».
Tout d’abord, il est intéressant de savoir que dans le Nouveau Testament, il y a deux mots grecs traduits par « pauvre » : Le premier (penes) désigne celui qui est dans un grand besoin et qui doit peiner dans le travail pour sa subsistance quotidienne. Le second (ptochos) désigne quelqu’un qui est démuni de tout, et qui est incapable de subvenir à ses besoins, au point d’être obligé de mendier. C’est ce second terme qui est utilisé par Jésus dans notre verset : ptochos.
Jésus disait donc : « heureux les mendiants en esprit ». Il est bien sûr question d’un mendiant sur le plan spirituel (d’ailleurs notre texte précise : en esprit), et non sur le plan matériel et financier. A ce propos, notons que Jésus n’a jamais dit que la pauvreté matérielle était une vertu...
Ensuite, notons que l’adjectif « heureux » ici, possède une connotation un peu spéciale. N’oublions pas que Jésus était juif et qu’il s’adressait à des juifs. Lorsqu’on retrace les racines de ce mot dans l’Ancien Testament, il signifie « Trouver la bonne direction et avoir la bonne orientation, après s’être perdu ». Si nous sommes perdus en pleine forêt, que la nuit commence à tomber et que nous avons peur du danger que nous sommes en train de courir, mais que finalement, nous trouvons un panneau qui indique le chemin vers la sortie de la forêt, c’est ce mot que les juifs du temps de Jésus auraient utilisé.
Jésus est en train de nous dire : « Si vous êtes un mendiant spirituel, vous êtes correctement orientés et vous vous trouvez sur le bon chemin, CAR vous pourrez avoir accès aux provisions de mon royaume ».
Mais qu’est-ce qu’un mendiant exactement ? C’est quelqu’un qui n’a rien, et qui dépend des autres pour sa subsistance. Un mendiant c’est quelqu’un de dépendant : il ne peut survivre sans la générosité et le secours des autres. Jésus nous montre que si nous voulons vivre dans son royaume, en communion profonde avec lui, afin d’être secourus par lui, nous devons devenir des mendiants spirituels, c’est-à-dire être absolument dépendants de lui...
Souvenez-vous de ce que Jésus a dit dans Jn 15.5 : Je suis le cep, vous êtes les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure porte beaucoup de fruit, car sans moi vous ne pouvez rien faire. Selon les termes grecs utilisés, Jésus déclare : « Séparés de moi et loin de moi, vous ne pouvez absolument rien produire ni acquérir ». Jésus veut vraiment nous rappeler notre totale dépendance de lui si nous voulons être secourus.
Nous disons « Amen ! » à ce genre de déclaration, mais nous prouvons par nos actes que nous ne le croyons pas : nous n’avons pas une attitude de mendiants devant lui, nous pensons que nous pouvons nous en tirer. Nous croyons que l’église, que le pasteur, que notre piété, que nos bonnes décisions feront l’affaire. Nous montrons par notre manque de dépendance de Jésus, que notre statut de chrétien, ou nos diplômes bibliques et ou notre implication dans le service de l’église, suffiront pour régler nos problèmes.
Mais c’est faux ! Tout est une attitude de cœur qui conduit à un comportement spécifique, et si nous voulons savoir comment être un mendiant en esprit, nous avons le meilleur des modèles : Jésus-Christ ! L’apôtre Paul déclare dans 2 Co 8.9 : Car vous connaissez la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, qui pour vous s’est fait pauvre, de riche qu’il était, afin que par sa pauvreté vous fussiez enrichis.
Le mot grec qui désigne Jésus en tant que pauvre ici, c’est le mot « mendiant » (penes en grec). Ce que ce verset nous dit, c’est qu’en quittant le ciel, Jésus est volontairement devenu un mendiant sur la terre. Bien sûr, pas un mendiant au sens matériel du terme, mais un mendiant en esprit, c’est-à-dire totalement dépendant de Dieu son Père. En tant que mendiant en esprit, Jésus dépendait entièrement des ressources de son Père céleste, comme il en a lui-même témoigné dans les textes suivants :
Jn 5.19 : Jésus reprit donc la parole, et leur dit : En vérité, en vérité, je vous le dis, le Fils ne peut rien faire de lui-même, il ne fait que ce qu’il voit faire au Père ; et tout ce que le Père fait, le Fils aussi le fait pareillement.
Jn 8.28 : Jésus donc leur dit : Quand vous aurez élevé le Fils de l’homme, alors vous connaîtrez ce que je suis, et que je ne fais rien de moi-même, mais que je parle selon ce que le Père m’a enseigné.
Maintenant, posons-nous la question : « Comment Jésus mendiait-il l’aide de son Père ? ». La réponse nous est donnée dans He 5.7-8 :
7 C’est lui qui, dans les jours de sa chair, ayant présenté avec de grands cris et avec larmes des prières et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort, et ayant été exaucé à cause de sa piété,
8 a appris, bien qu’il fût Fils, l’obéissance par les choses qu’il a souffertes.
Notons aussi que la fin de 2 Co 8.9 déclare : « afin que par sa pauvreté vous fussiez enrichis », ce qui signifie que c’est parce que Jésus a prié avec larmes et supplications que nous avons bénéficié de la provision du salut.
La vie dans le royaume de Jésus n’est possible que si nous apprenons à mendier en prenant conscience de notre absolue dépendance de Dieu, et de notre ferveur à prier avec larmes et supplications. Je crois que tout manque de prière est un péché, et pas seulement une faiblesse, parce qu’en ne priant pas, nous disons à Dieu : « je n’ai pas besoin de toi, je peux m’en sortir ! ». Depuis que j’ai compris ce principe, je m’entraîne à devenir un mendiant en esprit...
Il y a un enseignement qui circule dans l’église aujourd’hui pour apprendre aux chrétiens à devenir des « croyants intentionnels », c’est-à-dire des chrétiens qui visent des objectifs et qui les atteignent par la puissance de leur volonté et de leurs accomplissements personnels.
On leur apprend qu’ils ont de la valeur, qu’ils sont des princes et des princesses de Dieu, qu’ils sont destinés à régner et qu’ils peuvent accomplir tout ce dont ils rêvent. Quel contraste avec l’enseignement de Jésus qui dit « Heureux les mendiants » ! Dieu ne donne pas sa gloire à un autre, et il est dangereux de s’attribuer le moindre mérite quand nous prétendons que « Nous sommes des princes et des princesses de Dieu qui avons réussi, nous sommes les entrepreneurs de Dieu ! ... »
Penchons-nous sur le verset qui est largement utilisé pour soutenir cette notion contraire à l’Evangile de Jésus-Christ, car il parle de régner. C’est Ro 5.17 : Si par l’offense d’un seul la mort a régné par lui seul, à plus forte raison ceux qui reçoivent l’abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus-Christ lui seul. Notez que le règne dont il est question ici n’est pas le résultat de nos propres capacités. Rien dans ce texte n’évoque l’idée que nous serions des « entrepreneurs spirituels » qui peuvent réussir dans le monde. Il s’agit d’une autre réalité.
Les deux expressions clés de ce verset sont « l’abondance de la grâce », qui désigne plutôt la générosité de Dieu, et non pas nos accomplissements personnels ; et « par Jésus-Christ lui seul », c’est-à-dire, en dépendant totalement de lui. Ce sont donc les mendiants qui profitent du règne de Jésus, et non pas les princes et les princesses. Tout ceci pour vous dire que l’Evangile de Jésus, le vrai Evangile, c’est l’Evangile du Roi et des Mendiants. Es-tu un de ces mendiants ?
A bientôt...
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